Le combat de la FTH pour le juste poids et la juste valeur du tourisme tunisien
19 juin 2019Combien le tourisme tunisien pèse-t-il réellement dans le PIB du pays ? C’est le grand débat ouvert par la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH) depuis quelques mois afin de redonner au secteur la juste place qui lui revient dans l’économie du pays, mais pas seulement.
La FTH revient à la charge. Elle continue de soutenir mordicus que le secteur du tourisme est un poids lourd de l’économie du pays et qu’il pèse en réalité nettement plus que les 7 ou 8% comptabilisés dans les statistiques officielles. Le syndicat patronal a poussé la démarche jusqu’au bout en confiant au cabinet KPMG la réalisation d’une étude approfondie sur le poids réel du secteur. Ses résultats officiels ont été présentés hier lors d’une conférence de haut niveau à Tunis intitulée « Le tourisme, moteur de croissance ».
Le cabinet s’est appuyé sur des référentiels internationaux permettant de comparer les chiffres sur une base harmonisée prenant en considération tout d’abord les activités contribuant de manière directe au PIB du tourisme tels que définies par l’OMT (Organisation mondiale du tourisme), à savoir les services d’hébergement, les agences de voyages et autres services de réservation, les services de restauration, les services de transport, les biens caractéristiques au pays, etc.
Les faiblesses de la méthode de calcul classique
Dans une deuxième étape, KPMG a procédé à des ajustements sur les mesures prises en considération jusqu’à présent dans la comptabilité nationale réalisée par l’INS portant sur la contribution directe du tourisme dans l’économie. La méthode classique a démontré ses limites puisqu’elle surestime la valeur ajoutée provenant de la restauration et des cafés (même les établissements non touristiques étaient pris en considération). En parallèle, elle sous-estime la rubrique hébergement qui ne calcule que les modes d’hébergement classiques et exclut les locations directes aux particuliers via les différents canaux existants.
En troisième lieu, la méthode ne prend même pas en considération l’activité transport sous toutes ses formes, la location de véhicules, l’activité agence de voyages ni même les loisirs et autres biens et services liés au tourisme.
En foi de quoi, KPMG, à partir des données de l’INS (Institut national de la statistique), a dissocié la rubrique Ho-Re-Ca (hôtels, restaurants et cafés), a soustrait les contributions non touristiques et rajouté celles qui avaient été écartées des comptes. Elle a par ailleurs adjoint les parties « oubliées » et notamment les agences de voyages locales.
Loin du compte officiel
Au bout du compte, l’étude, après retraitement de toutes les données et la prise en considération des contributions directes et indirectes, a abouti à la conclusion suivante : l’effet direct du tourisme pèse 6,26% dans le PIB du pays, l’effet indirect 4,27% et l’effet induit 2,5%, ce qui fait un total de 13,03% du PIB. En foi de quoi, le secteur touristique doit être reconsidéré pour ce qu’il apporte au pays en termes de devises (21% de taux de couverture du déficit commercial), d’employabilité (11% de la population active) et d’investissements.
Ces chiffres étant désormais quasiment indiscutables, il s’agit d’en assurer le suivi et l’évolution. Pour ce faire, un outil recommandé par l’OMT se doit d’être mis en place en Tunisie. Il s’agit du Compte Satellite du Tourisme (CST) « qui date d’il y a 17 ans » a rappelé Khaled Fakhfakh. Le président de la FTH a en effet lancé un vibrant appel en présence du Chef du gouvernement, Youssef Chahed, afin de mettre en application d’urgence cet instrument qui permettra de bien mesurer l’évolution de l’apport du tourisme à l’économie. Sa gestion serait confiée à l’INS en lui attribuant un budget en conséquence.
Et comme l’occasion était belle pour les hôteliers de lancer leurs autres doléances, ils ont également saisi l’opportunité pour demander à ce que l’Open Sky et la 6e liberté pour les compagnies aériennes entrent en vigueur, ou encore que toute la Tunisie soit déclarée touristique. Sans oublier le fameux livre blanc relatif à la restructuration financières des hôtels jamais mis en application. Ce qui a fait dire à René Trabelsi, ministre du Tourisme et de l’Artisanat à la clôture des travaux, qu’il faudrait surtout un véritable « Plan Marshall » pour résoudre le problème de l’endettement pour pouvoir se diriger, ensuite, vers un objectif de 16 millions de touristes en 2030.
Hédi HAMDI
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